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24 septembre 2011 6 24 /09 /septembre /2011 10:07

  1) Renate Wesselingh, professeure d’écologie à l’Université catholique de Louvain (Earth & Life Institute - Biodiversity). Quelques éléments  de son intervention le 14 septembre ainsi que des discussions qui ont suivi - Journée « Pourquoi et comment produire la biodiversité » à la Chèvrerie de la Croix de la Grise.


Sans l’action de l’homme, la nature dans nos régions se « résumerait » à la forêt. Le développement de l’agriculture a contribué à l’augmentation de la biodiversité pendant des milliers d’années : la forêt a laissé place à diverses cultures et à l’élevage, lui aussi diversifié. C’est seulement avec l’intensification via les engrais chimiques et les pesticides que l’expansion de l’agriculture s’est « opposée » à la biodiversité. Depuis l’instauration de ces pratiques, cette dernière a considérablement chuté.

 

P1060036L’agriculteur d’aujourd’hui se focalise beaucoup trop sur la  production qu’il vend (litres de lait, tonnes de pommes de terre, quintaux de blé, …) jusqu’à perdre de vue sa dépendance envers le reste de l’écosystème au sein duquel il cultive et élève. La problématique du sol illustre bien cette erreur : de vrais rendements quantitatifs et qualitatifs dépendent à moyen et long terme de la santé du sol comme milieu vivant. L’expansion des monocultures, toujours plus exclusives, est la conséquence la plus ‘visible’ de cet état d’esprit.

 

La nature vierge n’existe plus, l’homme a façonné tous les paysages. Aujourd’hui, les agriculteurs sont toujours les principaux gestionnaires du paysage et rendent ainsi un service important au reste de la société : fournir un environnement où l’on se sent bien. Si les agriculteurs sont l’offre, cet environnement ressourçant est le bien en question et les concitoyens sont la demande. Tout service rendu mérite rétribution et celle-ci sera fonction de l’appréciation du demandeur du service.


La Politique agricole commune a coutume d’inciter les aménagements bénéfiques à l’environnement en les compensant avec des primes & subventions. À l’heure de la restriction budgétaire à tous les étages, la nouvelle PAC intégrera les mesures environnementales aux conditionnalités (conditions à respecter par l’agriculteur pour que les subventions auxquelles il a droit lui soient versées). Ces deux méthodes n’entrainent pas une véritable responsabilisation des agriculteurs envers leur environnement : la rétribution n’est pas fonction de la qualité du service rendu dans la réalité, ce qui n’incite pas à agir pertinemment envers la nature.


P1020637.JPGAux Pays-Bas, un nouveau système de rétribution est expérimenté : l’agriculteur est rémunéré proportionnellement à la biodiversité qu’il produit. Par exemple, il reçoit x euros par oiseau rare qui niche sur ses terres, x euros pour telle ou telle plante menacée, etc. … Il n’y a donc pas de contraintes et l’agriculteur doit acquérir de nouvelles connaissances pour gérer cette « nouvelle production ».


Les récentes inondations ont pointé la gestion des agriculteurs trop focalisée sur l’unique production. La commune du Mont de l’Enclus a obligé les agriculteurs cultivant des « zones à risques » par rapport aux coulées de boue à semer des bandes enherbées en lisière de leurs champs. La commune verse une compensation à l’agriculteur pour la perte de production occasionnée. Outre le problème juridique que cela peut poser, cet exemple met en exergue la question de la responsabilité. Cultiver un champ en pente n’impliquerait-il pas d'emblée la responsabilité du fossé d’en bas ? Faut-il verser des primes pour des services autrefois rendus ? Ne faudrait-il pas plutôt infliger une amende pour cette erreur de gestion ? N’est-ce pas, avant tout, une question de civilité et de vie en société ? L’échevin tournaisien, Jean-Marie Vandenberghe, fait remarquer que les automobilistes respectant le code de la route ne reçoivent pas une prime pour bonne conduite.


L’urbanisation croissante porte souvent préjudice à la biodiversité : les jardins clos, les pelouses tondues et homogènes, la perte de grands espaces inhabités nécessaires à certaines espèces,… Le groupement de l’habitat autour des noyaux villageois devient impératif. 


La concentration de la production agricole toujours P1000831.JPGcroissante va se heurter à la diversité de nos paysages. Le vallonnement et la diversité de nos sols impliquent, pour un véritable rendement, une connaissance pointue de nos terroirs. Les agriculteurs ne rencontrent pas tous les mêmes contraintes (relief, climat, etc.). Nous devons donc tirer avantage de cette diversité pour préserver des paysages en mosaïque (bénéfice écologique) et, ajoute Jean Frison, une agriculture familiale et paysanne (bénéfice économique).


En effet, produire plus chez nous ne mettra pas "fin à la faim" : les pays du Sud ne pourront jamais acheter de la nourriture qui aura couté, chez nous, tant d’investissements et de pétrole alors que chez eux, la main d’œuvre est peu chère. Du milliard d’être humains souffrant de la faim, plus de la moitié sont paysans et ne demandent qu'un travail justement rémunéré.


Tant pour les questions écologiques qu’économiques, l’agriculture doit se penser d’une façon davantage globale et sur un plus long terme.

 

Suite...

V. D. (2011)

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