Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
3 mai 2011 2 03 /05 /mai /2011 12:30
Partager cet article
Repost0
30 avril 2011 6 30 /04 /avril /2011 23:46

Notes prises lors de la conférence sur l’agriculture biodynamique

le 30 avril 2011 à Chercq (Tournai)

André Dumey (Valenciennes) et Joëlle D’Hondt (Soignies)

________________________________________________________

Dans le prolongement de l’agriculture biologique, la biodynamie insiste davantage sur une vision globale et systémique de l’agriculture. Les différents règnes du monde naturel (minéral, sol, végétal, animal & humain) sont interdépendants, ils doivent donc vivre en harmonie et en adéquation. Rudolph Steiner [1]considérait la ferme comme «un organisme agricole », comparable au corps humain, constitué d’un ensemble de parties qui travaillent séparément et ensemble à la fois, qui s’interpénètrent, qui sont toutes différentes mais où chacune a son rôle, qui ne travaillent pas pour elles-mêmes mais bien pour une cause commune. Les biodynamistes considèrent tout particulièrement le terroir en tant que dimension à la fois globale et spécifique du lieu. Le monde naturel est vivant et les interactions qui s’y produisent ont des incidences qui bien souvent nous dépassent.

L’immense diversité d’organismes est largement justifiée par une répartition des rôles à jouer dans le système. Par exemple, la décomposition, véritable travail à la chaîne, fait appel à une longue suite d’êtres : des cloportes aux collemboles pour le broyage, une large gamme de champignons pour la transformation et d’animaux (principalement les vers) pour la digestion et le transport. Selon André Dumey, pour réaliser un bon compost, il faut passer le fumier dans le moulin de l’épandeur afin de pré-broyer et d’aérer. Il ne doit pas chauffer de trop, contrairement à ce que l’on dit en bio (pour tuer les parasites et brûler les semences de ‘mauvaises herbes’), le cas échéant le compost perdrait de son énergie et se minéraliserait : il fertiliserait alors le sol au lieu de le vivifier (le faire travailler). Certaines préparations permettent d’empêcher le compost de chauffer. Un bon fumier disparait rapidement dans un bon sol : il est rapidement absorbé.

Une plante qui pousse trop vite est déséquilibrée et donc déséquilibrante pour celui qui la mange: les besoins de la plante sont très diversifiés, ils nécessitent donc un milieu équilibré. Le poids, mesure habituelle d’échange dans l’agriculture conventionnelle, ne rend pas compte de la vraie qualité du produit : sa richesse et son équilibre.

L’ortie est la plante royale pour les biodynamistes : elle contient beaucoup d’éléments intéressants et notamment du fer [2]sous forme vivante (non minérale) ce qui la lierait à la planète Mars. Par la richesse de sa composition, elle est une grande régulatrice, elle améliore significativement la fécondité et la santé des jeunes les premiers mois après la naissance. André Dumey parle « d’effet levure » pour dire que l’ortie aide à l’assimilation des autres plantes par l’animal.

« Une terre vivante se guérit elle-même » ainsi les adventices, « mauvaises herbes », ont leur rôle dans le rétablissement de l’équilibre sanitaire du sol. Le mouron aide à la digestion d’une grande concentration de matière organique. En fleurissant, la renoncule et le pissenlit évacuent le poison du sol : il faut donc « faire fleurir la terre » en intégrant à la rotation un assolement fleur.

L’agriculteur en biodynamie essaie de profiter au maximum des interactions positives entre les organismes : la symbiose. Il préfèrera donc la luzerne et les légumineuses au maïs. La luzerne produit du sucre en exsudat par ses racines et attire des bactéries spécifiques dispersées dans le sol qui intégreront l’azote de l’air au sol et participeront ainsi à l’enrichissement du sol. Cette interaction est non seulement gratuite mais est largement positive pour l’agriculteur : il produit et enrichit son sol à la fois. Tous les organismes sont en interactions avec les autres : ils bénéficient de leur voisinage et lui rendent la chandelle sous une autre forme : seul l’homme prend sans rendre, le compost est donc sacré pour les biodynamistes : c’est le remerciement des hommes à la terre.

La biodynamie est connue pour ses préparations. La première est la bouse de corne, elle interpelle les forces telluriques et aide au développement racinaire. La seconde est la silice en lien cette fois les forces cosmiques et de structure, elle intervient pour la partie aérienne de la plante. Ces deux préparations se combinent et se complètent. Même si les quantités à l’hectare utilisées paraissent infimes, les résultats ne se font pas attendre : le seigle ne verse plus, les animaux qui s’en nourrissent sont plus vifs, etc. Une troisième préparation s’ajoute : le compost de bouse qui aide à la décomposition et qui est considéré comme un grand dépolluant.

DSCN0119.JPG


Qu’en penser ?

À notre époque, ces méthodes et pensées peuvent paraître farfelues et mystiques. Elles nous viennent d’un long héritage qui a été violemment menacé au début du XXe avec le développement de la science agronomique. Il faut rester critique et clairvoyant face à ces connaissances mais nous devons tout au moins avoir la finesse de nous en inspirer, il y a de l’idée là derrière. C’est un savoir empirique qui est resté trop longtemps « hors-la-science » et que nous devons actualiser. Sa perception holistique de la ferme, « l’organisme agricole », sa dimension ‘système d’interactions’ et le rôle de la biodiversité : au moins trois thèmes qui trouvent sens avec les récentes avancées de la science. Si cette méthode agricole interpelle des forces dont nous ne savons encore que peu de choses, ne les rejetons pas et tentons humblement, à coup d’expériences personnelles, de les utiliser…



[1] Lire le « cours aux agriculteurs » de Rudolph Steiner

[2] Et aussi deux fois plus de protéines que le soja 

Partager cet article
Repost0
29 avril 2011 5 29 /04 /avril /2011 23:46

Occupation exclusive

Durant le XXe siècle, l’agriculture a connu un développement technologique inégalé. Ces technologies ont davantage répondu aux besoins du monde agricole et ont profondément métamorphosé le paysage de certaines régions : l’expansion de la monoculture et l’agrandissement des parcelles en sont les principaux symptômes. Les connaissances sur les cultures ont tant augmenté que le reste du système écologique est passé au second plan des préoccupations. Le métier d’agriculteur s’est alors concentré uniquement sur la gestion de la production.

Afin d’optimiser le contrôle sur les phénomènes naturels influençant la culture et donc les rendements, la politique a été d’exclure tout ce qui n’est pas désiré en désherbant les « prairies » comme les champs, en « désinfectant » le sol pour les betteraves, en arrachant les haies qui, disait-on autrefois, volent l’engrais chimique aux cultures, en rabotant les talus et labourant tous les derniers espaces sauvages, « inutiles ». Homogénéiser pour éviter la compétition et mieux appliquer les nouvelles technologies vendues : gros tracteurs, engrais chimiques, grandes charrues, larges semoirs et pulvérisateurs, variétés sélectionnées,... Faites place !

L’agriculture biologique[1], rejointe par de nouvelles études elles aussi plus holistes, invitent à penser notre métier d’une autre façon. L’homme de la terre ne doit pas se focaliser uniquement sur sa culture, il faut penser notre action au sein du système écologique. Le monde vivant abonde d’interactions entre les organismes qui ont des effets positifs comme négatifs et la diversité est sa principale force de résilience[2]. De nouvelles connaissances permettront de mieux comprendre ces interactions et donc de savoir les utiliser comme technologies à part entière dans l’agriculture.

DSCN0144.JPGLa monoculture et les champs qui s’étendent à perte de vue constituent de réels déserts du point de vue de beaucoup d’organismes qui, comme tous sur Terre, ont leur rôle à jouer dans « l’écosystème ». Cette exclusion est très coûteuse car elle nous prive d’un travail gratuit et menace terriblement la biodiversité. Le mode de production agricole actuel n’intègre pas ces organismes et les considère donc comme étrangers, invasifs, nuisibles… Le métier d’agriculteur est devenu celui d’un combattant qui, sans cesse, lutte contre tout ce qui pourrait faire de l’ombre à sa production : taupes, camomilles, chénopodes, nématodes, oiseaux, etc. : tout finit par déranger à un moment ou à un autre.

La création de déserts thermiques, éoliens ou encore hygrométriques porte atteinte à la survie de beaucoup d’insectes. L’homogénéisation de l’occupation du sol fragmente l’habitat de ces organismes en diminuant « l’edge effect » et les privant de corridors, connections avec d’autres foyers qui permettent la recolonisation en cas d’extinction locale. Le système écologique, pour bien fonctionner, nécessite une diversité d’organismes « acteurs » et cette dernière nécessite, à son tour, une diversité de micro habitats dont il faut garantir la disponibilité.

DSCN0102En occupant la plus grande partie du paysage, nous nous devons tout d’abord de garder une place pour ces êtres et qui plus est, de leur donner un rôle. Pour préserver la biodiversité  tout en évitant la schizophrénie des « tournières » et autres actions ponctuelles hypocrites, il faut faire participer la biodiversité à notre production globale (tous services inclus) et à la santé de notre milieu (sol, végétaux et animaux) en misant sur le caractère « DIVERSITE ».

 Reconsidérons nos multiples fonctions au sein de la communauté humaine (alimentation, paysage, etc.) en y ajoutant l’entretien des services écosystémiques, garanti par un mode de production durable et sensé. Ce nouvel élément pèse davantage dans le budget collectif : inondations & érosion (è tassement et mauvaise considération du sol), tempêtes (èdisparition des haies et homogénéisation du paysage), dioxyde de carbone (èà stocker dans le sol via les arbres, les prairies et les cultures, notamment les légumineuses) et finalement la préservation de la biodiversité comme patrimoine de grande richesse culturelle et scientifique (ègarantir un habitat et un rôle). Reconnaitre de la valeur à l’écosystème et à ses services contribuera à revaloriser notre travail.

Nous devons réapprendre à produire, en incluant cette vision holiste voire citoyenne du respect et de la reconnaissance de la biodiversité, à jongler avec ces interactions, à penser « système » et à bénéficier d’un travail gratuit, si peu consommateur de pétrole ! Complexifions notre approche économique en y intégrant davantage d’éléments, faisons reconnaitre socialement notre rôle et revendiquons davantage d’autonomie dans nos choix d’action afin de préserver notre Mère et ainsi, notre raison d’être…

DSCN0134                          Vincent Delobel (2011)



[1] Définitions : voir la page sur l'AB 

[2] A bien distinguer de résistance, la résilience signifie  la capacité d'un système à ne pas s'effondrer suite à une perturbation. (Ekopédia) On y ajoute souvent la rapidité à laquelle le système revient à sa situation d’équilibre après un choc (une sécheresse par exemple).

Partager cet article
Repost0
29 avril 2011 5 29 /04 /avril /2011 22:31

Historique de la Chèvrerie, écrit par Francis et Christiane en 1999, deux ans après notre reconversion au BIO alors que nous n'avions pas encore de chèvres mais bien des vaches laitières.

 

Reconversion à l’agriculture biologique

Nous sommes agriculteurs depuis 1982. Notre ferme est exclusivement orientée vers la production laitière. Nous cultivons 24ha, en terrain argileux et relativement accidenté. Nous avons un quota de 250 000l. Toute la culture est donc destinée à l’alimentation de notre troupeau Holstein (35 vaches + élevage).

En 1997, nous nous sommes reconvertis à l’Agriculture Biologique. Pourquoi ? Comment ? Telles sont les questions que vous vous posez certainement… Je vais essayer d’y répondre et, pour bien me faire comprendre, je vais d’abord vous expliquer comment nous travaillons avant notre reconversion.

À l’époque, notre plan de culture s’établissait comme suit : les 24ha se partageaient en 14ha de prairies et 10ha de maïs. Nous achetions des drèches, des sur pressées et, pour compléter la ration, des tourteaux de lin, soja et granulés de luzerne. Autrement dit, nous produisions, au maximum, l’énergie et achetions la protéine. Les vaches étaient majoritairement nourries à l’étable, même l’été. Elles passaient la nuit à l’intérieur, tout le long de l’année.

En 1984, nous nous inscrivons au contrôle laitier. En 1986, la gestion du troupeau (génétique et production) fut confiée au service informatique de l’Association Holstein (Lactoplan). En 1988, nous nous équipons d’un peseur pour les fourrages grossiers et d’un DAC pour la distribution des concentrés. A partir de 1991, nous bénéficions du suivi fécondité (programme GARBO) par l’Université de Liège. En 1995, nous achetons une mélangeuse. Comme vous pouvez vous-mêmes le déduire de ce parcours, l’objectif poursuivi était la performance à tout prix. Chaque vache était poussée à son maximum. Certaines répondaient mieux que d’autres,  mais, finalement, nous nous sommes rendus compte que les derniers litres « arrachés » de gré ou de force coûtaient très chers au portefeuille de l’éleveur et à la santé de l’animal également.

C’était le stress continuel : tout pesé, calculé, minuté. Toujours à l’affût du moindre signe de faiblesse. La seringue à la main et la calculette en tête.

En 1997, nous changeons notre fusil d’épaule et décidons de nous reconvertir à l’agriculture biologique.

Pourquoi ? Sans doute, est-il important de s’asseoir de temps en temps, pour retrouver le bon sens et remettre les pendules à l’heure. Nous remarquons, par exemple, que l’excès d’azote (surtout en ray-grass) était source de problèmes pour les vaches, que la multiplication des traitements médicaux, hormonaux et les ajouts d’enzymes, minéraux de synthèse, etc. dans la ration fragilisaient l’état général des animaux. De plus, ce système de rotation court avec maïs à répétition détériorait la structure du sol.  Celui-ci devenant de plus en plus lourd et compact, nous devions faire appel à un entrepreneur pour labourer ? Le passage de lourds engins n’était pas pour arranger les choses étant donné la nature argileuse du terrain. Le désherbage du maïs devenait de plus en plus compliqué. Certaines plantes devenaient résistantes (morelle noire, liseron,…), d’autres indésirables faisaient leur apparition (panic,…). Il y a 15 ans, un seul traitement à l’atrazine permettait d’avoir un champ propre. Les dernières années, Frontier, Mikado et les autres arrivés en renfort n’étaient quand même plus maîtres de la situation…

Nous nous voyons entraînés dans une spirale infernale qui nous rendait dépendants de toute cette artillerie phytopharmaceutique. Produire, mais… à quel prix ? Empoisonner le monde et, finalement, travailler pour qui ?

DSCN0096

Venons-en maintenant à notre méthode de travail actuelle et abordons tout d’abord le plan de culture. Nous avons supprimé totalement la culture du maïs et l’avons remplacée, en partie par des céréales fourragères à destination du bétail. Nos 24 ha se partagent donc maintenant comme suit : 19ha de prairies (mélange de graminées et de légumineuses) et 5 ha de céréales (triticale, avoine, épeautre et pois). La rotation  s’étale donc sur 4 ans : chaque année, après la moisson, nous réimplantons 5ha de prairies et, en octobre, nous labourons 5 ha de prairies pour ensemencer les céréales. Le mélange prairie comprend une douzaine de variétés : fétuque, fléole, dactyle, ray-grass italien et anglais, 5 variétés de trèfles et de la luzerne. Les trèfles sont choisis en fonction de leurs différences de taille, chacun disposant ainsi d’un bon espace de production et consistant une bonne occupation du sol d’une grande diversité. Ces légumineuses apportent au sol l’azote nécessaire à la croissance des graminées. La potasse et l’acide phosphorique sont amenés, soit par du compost, du fumier ou du lisier dilué et ce, pendant la période qui s’étale d’août à février inclus, c’est -à-dire quand le travail d’assimilation des vers de terre est le plus important dans la couche superficielle du sol.

Pour ce qui est de la culture de céréales : après le labour de la prairie, nous ensemençons direct avec un combiné vibro-semoir, pour maintenir une structure grossière du sol. En effet, ces « grosses mottes » constitueront, pour les jeunes pousses, un abri contre le vent et le froid ; leur érosion lente et continue tout au long de l’hiver empêchera la germination de plantes concurrentes et l’asphyxie du sol.

Quant à la  ration des vaches, nous essayons de produire sur la ferme une alimentation équilibrée et diversifiée et non plus essentiellement énergétique, comme auparavant. Toutes les parcelles de fourrages peuvent être soit pâturées soit fauchées et préfanées, selon le temps et les besoins. Cela nous  permet de fournir aux vaches un « menu » constant tout au long de l’année. En été : jour et hui en prairie et complémentation de céréales. En hiver : 20 à 25kg de préfané enrubanné (à 65% M.S.)+ 3kg de mélange de céréales aplaties + foin et paille à volonté.


CONCLUSIONS

Il est trop tôt pour tirer des conclusions définitives sur notre mode de production étant donné notre récent passage à l’agriculture biologique. Néanmoins, nous pouvons vous faire part de quelques constatations. Nous remarquons, dés à présent, que le sol devient beaucoup plus facile à travailler. La terre respire, retrouve son aspect d’éponge et est beaucoup plus perméable. Moins d’eau stagnante après les pluies. L’enracinement plus profond des prairies les rend plus résistantes à la sécheresse.

Pour ce qui est de la production de lait, nous assistons à un léger tassement du niveau de production, sans devoir parler véritablement d’une baisse. Après analyse, il apprait que ce tassement est dû plutôt à notre façon de conduire le troupeau qu’au changement d’alimentation des vaches. Notre objectif n’est plus de forcer la vache à nous donner son dernier litre de gré ou de force. Nous visons à maintenir le troupeau dans une bonne vitesse de croisière, en respectant l’étant général des animaux plutôt que la performance individuelle. Nous constatons également une réduction sensible des frais vétérinaires. Diminution du nombre de boiteries dues aux nitrites, diminution des problèmes parasitaires étant donné le renouvellement régulier des prairies par exemple.

Une des difficultés rencontrées lors de notre reconversion fut d’ajuste la taille du troupeau à la norme imposée de 2 UGB/ha. Auparavant, nous élevions systématiquement tous les veaux femelles nés à la ferme. A nous de trouver l’équilibre entre le nombre de vaches et l’élevage afin de produire du lait, assurer la relève et produire un maximum de nourriture nous-mêmes.

Une autre difficulté fut l’isolement et le peu d’encadrement technique. En Belgique, l’agriculture biologique tend à se développer que depuis 3 ou 4 ans et ce, dans la région de Liège et du Luxembourg. Par contre, en France, elle connaît un essor important. Habitant la région frontalière, c’est chez nos amis français que nous avons pu trouver conseils, semences, etc. …

Une troisième difficulté est la valorisation de notre lait en tant que lait biologique. Nous sommes agréés par « bio garantie » depuis juin 1998 et percevons donc, depuis lors, une plus value de 2,4 FB/l, mais notre production n’est jusqu’à présent pas ramassée séparément. En effet, nous fournissons à une laiterie française depuis un certain nombre d’années. Celle-ci a mis en route une filière bio depuis novembre 1999. Quelques légères différences subsistant entre le cahier des charges français et belge l’empêchent de collecter notre lait. Cela devrait se normaliser dans le courant de cette année 2000.


Quels avantages voyons-nous à ce nouveau mode de production ?

Outre l’amélioration de l’état du sol et l’étant sanitaire du bétail tels que nous l’avons expliqués plus haut, la pratique de l’agriculture biologique a complètement modifié l’organisation du travail. Le travail des champs est mieux réparti tout au long de l’année : plu de « gros coups » à la mauvaise saison par exemple. Nous avons également le sentiment d’une plus grande autonomie dans la gestion de la ferme. Cette nouvelle méthode fait davantage appel à l’observation, à l’intuition. Elle accule à repenser les choses par soi-même, plutôt qu’à être des simples exécutants.

Nous travaillons le cœur plus joyeux, nous ne travaillons plus « contre » mais avec -plus en harmonie- nous essayons de sentir les besoins de la terre, des bêtes et ils le rendent, un contact s’est rétabli.

En deux mots, pour terminer, nous voulons dire que, pour nous, l’agriculture biologique c’est d’abord une question de conscience et de bon sens. Peut-être le défi qui s’offre aux agriculteurs d’aujourd’hui est-il de retrouver l’audace de la liberté Si j’ai accepté de vous apporter ce témoignage ce soir, ce n’est certainement pas pour essayer de faire des adeptes. C’est tout simplement pour vous dire que c’est possible…

Francis Delobel, Décembre 1999

Partager cet article
Repost0
23 avril 2011 6 23 /04 /avril /2011 14:22

Manger bio, pas cher et pour tous, une utopie ? RUE 89

Par Terra Eco | Le magazine qui change le monde | 22/04/2011 |

 

A quoi ressemblera l'assiette du futur ? Que du bio ? Des OGM à gogo ? Réponses du patron de la FNSEA, Xavier Beulin, et de l'agronome Marc Dufumier.

1) Au-delà des effets de mode, l'alimentation bio peine à décoller. A-t-elle un avenir ?

-> Xavier Beulin : Il y a les objectifs du Grenelle, un dispositif national, des mesures européennes pour aider aux conversions et à la production bio. Et puis un soutien indirect via la restauration collective. Tout cela incite beaucoup d'agriculteurs à tenter la conversion ou à se lancer en bio. Il faudra mesurer dans le temps ce que ça donne. Mais cela suppose que les consommateurs acceptent de consacrer plus d'argent à se nourrir. La part de l'alimentation dans les budgets était de 16 % en 2000. Elle est de 11 % aujourd'hui, malgré la hausse du pouvoir d'achat. C'est un point fondamental pour le bio comme pour le conventionnel. On a atteint un seuil difficilement compressible. On ne peut pas avoir une alimentation à la fois saine, diversifiée, de qualité et pas chère.

-> Marc Dufumier : Oui, le bio restera plus cher que le conventionnel. Et pour le rendre accessible aux plus modestes, il faut une politique de redistribution des revenus. Tout est lié. Et oui aussi, le bio va prendre de plus en plus de place. Mais il pourra sortir de son marché de niche uniquement si les pouvoirs publics l'encouragent davantage. Or il y a urgence à mettre en place des pratiques agricoles respectueuses de l'environnement. Il nous faut revoir la copie pour parvenir au zéro « agrotoxique ». Y aller de façon décisive et massive et sortir le bio de la marge. Une solution pourrait être de transférer les subventions en faveur du bio vers la restauration collective. L'idée étant que les cantines achèteraient en masse, et à un prix juste pour les paysans, des produits bio de qualité et de proximité. Les circuits de distribution atteindraient une taille critique, économiquement viable, un marché stable et rémunérateur s'installerait. Aujourd'hui, quand les grandes surfaces veulent se ravitailler en bio, elles vont à l'étranger, en Autriche, en Allemagne, en Italie, des pays où les circuits de distribution ont atteint cette taille critique.

2) Faut-il une agriculture bio à deux vitesses, intensive et moins exigeante d'un côté et paysanne et ultraqualitative de l'autre ?

-> Xavier Beulin : On ne vit pas dans un monde angélique. Si demain l'industrie et la grande distribution se mettent sur ce segment, ça ne se fera pas d'une façon différente de ce qui se passe pour l'agriculture conventionnelle. Pour y répondre, nous, en face, devons avoir une organisation et des volumes qui sont ceux des grandes et moyennes surfaces.

-> Marc Dufumier : Surtout pas de système à deux vitesses ! Il nous faut un seul bio et il doit être intensif. Pas en produits chimiques, mais en plantes capables de prendre l'azote de l'air, en coccinelles, en abeilles, en utilisation de ressources naturelles renouvelables et inépuisables. Il faut reconstituer l'humus des sols, planter des haies pour éviter les vents desséchants. On peut produire beaucoup à l'hectare avec des techniques artisanales. Le mot intensif n'est pas opposable au mot paysan. En revanche, notez que l'agriculture moto-mécanisée et chimique est une agriculture très extensive.

3) Le Grenelle annonce 50 % de réduction des quantités de pesticides utilisés d'ici à 2018. Est-ce que c'est jouable ? Et si oui, comment ?

-> Xavier Beulin : C'est dans le Grenelle, l'objectif sera tenu. Depuis dix ans, on a déjà réduit de 30 % l'usage des pesticides. On a travaillé en amont sur la recherche fondamentale avec l'Inra [Institut national de la recherche agronomique, ndlr] pour détecter les techniques moins consommatrices de pesticides, comme la rotation des cultures. C'est un travail de longue haleine mais il y a des signes positifs. Sur mon exploitation, on a diminué de 10 % les pesticides avec du matériel performant.

-> Marc Dufumier : L'Inra affirme qu'on peut réduire de 30 % les pesticides en 2018 en modifiant les pratiques à la marge, selon l'étude Ecophyto R&D parue en janvier 2010. Mais les réduire de 50 % ne sera possible qu'à condition de refondre totalement notre système de production. Il y a des démarches de production raisonnées intelligentes, mais elles butent sur une limite : nos systèmes sont trop spécialisés et trop courts. Il faut réassocier agriculture et élevage. La refonte, c'est quelque chose de savant et d'artisanal à la fois.

4) Y aura-t-il une place pour les OGM dans la production française et dans nos assiettes ?

-> Xavier Beulin : J'ai un regard distant sur la première génération d'OGM, comme le maïs Bt ou les OGM résistants aux herbicides. Ils ont été un moyen de subordonner les agriculteurs à des technologies. Mais aujourd'hui, les grandes firmes internationales sont dans une autre approche. Elles cherchent des réponses techniques à des enjeux auxquels nous sommes confrontés. Si demain on crée des plantes qui résistent mieux à la sécheresse ou qui savent capter l'azote de l'air pour se nourrir, qui sont testées au plan environnemental et sanitaire, pourquoi s'en priver ? Il faut au minimum une cellule de veille et de recherche. Et aller au-delà des peurs et de l'idéologie. Ma position est pragmatique.

-> Marc Dufumier : Ces OGM première génération ont un intérêt immédiat : ils permettent d'utiliser moins de pesticides et de désherber à moindre effort. Mais les expériences du Canada, de l'Argentine et du Brésil montrent que des espèces résistantes finissent par se développer. Ça n'est donc pas une solution. Quant aux OGM deuxième génération, on m'en parle depuis dix ans ! Les manipulations des gènes sont difficiles et peuvent avoir des conséquences sur des fonctions de la plante qu'on ne voulait pas toucher au départ. Par exemple, le fameux « riz doré » génétiquement enrichi en vitamine A : il s'avère que la plante utilise ses propres hydrates de carbone pour la produire. Conséquence, elle a un moindre rendement. Mieux vaut ajouter des tomates ou des carottes dans son assiette pour avoir de la vitamine. Je ne suis pas dans la diabolisation, j'attends de voir. Mais je sais qu'il est plus urgent d'attribuer des budgets de recherche au fonctionnement de l'agro-écosystème. Il y a tellement de choses à faire, avec des résultats prometteurs et directement accessibles aux paysans.

5) De plus en plus, des circuits courts recréent des liens étroits entre consommateurs et producteurs. Est-ce une tendance lourde ?

-> Xavier Beulin : Ces expériences, notamment celles du développement des ceintures vertes autour des villes sont intéressantes. Il faut les encourager. Et puis les circuits courts, c'est aussi l'organisation à l'échelle de bassins régionaux de liens plus formels entre filières animales et végétales. La Politique agricole commune a fait de nous des hyper-spécialistes. Il faut remettre de la transversalité, sans pour autant revenir en arrière vers le modèle de la ferme où tout est intégré. Mais recréer des boucles locales : produire du végétal pour nourrir des animaux voisins, qui eux-mêmes produiraient des fertilisants servant à la production des végétaux.

-> Marc Dufumier : Les grandes et moyennes surfaces s'approvisionnent loin pour faire des économies d'échelle. Certains circuits courts, tant qu'ils n'atteignent pas une taille critique peuvent être contreproductifs. Exemple : si chaque abonné à une Amap vient avec sa voiture chercher son panier hebdomadaire sur l'exploitation, la facture en CO2 pèse lourd. En revanche, on peut faire en sorte que des producteurs de qualité puissent en nombre approvisionner la restauration collective sur un circuit court. Alors on réduit les coûts de la collecte et les émissions de CO2. Faisons des Amap, mais de taille critique. Alors on devient compétitifs. Et oui, avoir mis de la distance entre l'élevage et la culture est une erreur grave. Il faut que la paille des céréales serve de litière aux animaux puis devienne du fumier. Remettons de l'élevage en Picardie, dans le Vexin, en Beauce.

6) Doit-on craindre des scandales sanitaires, du type dioxine dans les œufs en Allemagne ? La qualité générale de notre alimentation se dégrade-t-elle ?

-> Xavier Beulin : On a sans doute en France les meilleurs services au monde en matière de prévention des risques. D'ailleurs, nous, les producteurs, trouvons parfois qu'on en fait trop par rapport à nos voisins. Il y a un marché unique en Europe, mais les règles sanitaires et environnementales ou les pratiques agricoles ne sont pas unifiées. Cela crée des distorsions de concurrence. Et la France perd des parts de marché chez elle comme à l'exportation, à cause de cela et du coût du travail. En Allemagne, l'augmentation du cheptel porcin sur les dix dernières années est égale à la production nationale française… Pas sûr qu'on ait gagné si, au final, on a tué une partie de l'élevage français. Il ne faut pas baisser la garde, nous ne voulons pas un nivellement par le bas, mais nous ne voulons pas non plus être en décalage par rapport aux standards des autres européens. Les ONG qui nous tapent dessus devraient s'intéresser à ce qui se passe à l'étranger.

-> Marc Dufumier : Il s'agit de problèmes environnementaux qui dépassent le cadre de l'élevage. On aurait tort de les imputer aux seuls agriculteurs. La France ne sera pas exempte de scandales. Le glyphosate pourrait provoquer le prochain. C'est un herbicide, celui du Roundup, qu'on retrouve aujourd'hui sous d'autres marques. Il est biodégradable mais l'une de ses composantes biodégradées, l'Ampa, est inquiétante : elle est peut-être liée à des cancers et des maladies neurovégétatives. Le principe de précaution voudrait qu'on en limite l'épandage. Le problème, c'est qu'il est difficile de dire qu'un pesticide est la cause directe d'un cancer. Il n'est pas sérieux de faire des liens de cause à effet, sans faire d'études prolongées. Le seul lien avéré entre un pesticide et une maladie est celui du chlordécone, utilisé pendant des années pour les bananes aux Antilles, et du cancer de la prostate. Globalement, on doit l'espérance de vie accrue à une meilleure sécurité alimentaire. Mais les épidémiologistes laissent entrevoir un autre tableau pour les jeunes générations. Il y a de fortes présomptions pour que l'exposition à des pesticides ajoutée à d'autres pollutions – celles par exemple qu'on trouve dans les maisons –, forme un cocktail chimique entraînant la stagnation, voire la diminution de l'espérance de vie. Il y a urgence à appliquer le principe de précaution, qui n'est pas un principe d'inaction. Au contraire, il s'agit de mettre en place les alternatives. Et l'alternative constructive aujourd'hui, elle existe, c'est l'agriculture bio.


=> Xavier Beulin, céréalier du Loiret et président de Sofiproteol, géant français des huiles, a été élu à la tête de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles en décembre.

=> Marc Dufumier, ingénieur agronome, dirige la chaire d'agriculture comparée à AgroParisTech et mène des projets de développement agricoles en France et dans les pays en développement.

Partager cet article
Repost0
19 avril 2011 2 19 /04 /avril /2011 22:00

Le Centre National de Coopération au Développement "est la coupole d’une septantaine d’ONG de développement, de syndicats et d’associations d’éducation permanente engagées dans la solidarité internationale en communauté française et germanophone de Belgique. Avec ses organisations membres, le CNCD-11.11.11 réalise trois missions essentielles :

image002--2-.jpg

  • interpelle les instances politiques nationales et internationales sur leurs responsabilités en matière de coopération au développement et de solidarité internationale.
  • assure la promotion de campagnes de sensibilisation, d’information et de mobilisation de la population
  • finance grâce à l’Opération 11.11.11 des programmes d’actions et des projets de développement en Afrique, Amérique latine, Moyen-orient et Asie."

Le CNCD bénéficie de l'engagement de centaines de bénévoles qui se réunissent en groupes locaux. Je fais partie du GL de Tournai avec Patrick, Jean-Félix et Nicolas qui étaient présents le 2 avril. Stéphane qui nous a présenté son film est chargé de recherche "Souveraineté Alimentaire" (je vous invite à lire leur plaidoyer via le lien).logo_PFSA-324x150.gif

 

La Plate-Forme pour la Souveraineté Alimentaire (PFSA) "rassemble des organisations paysannes, de solidarité internationale, d’environnement et des organisations de consommateurs qui travaillent ensemble pour défendre, au Nord comme au Sud, la régulation de l’agriculture et du commerce. Pour la PFSA, l’alimentation ne peut se résumer à une simple marchandise et l’agriculture a besoin de politiques agricoles et de régulations de marchés fortes pour répondre aux attentes de la société. C’est pourquoi, la PFSA et ses membres font un travail de plaidoyer politique au niveau belge et européen et une sensibilisation du public pour renforcer cette pression politique et changer nos comportements." Stéphane Desgain travaille aussi pour cette plate-forme ainsi que des représentants de la FUGEA.

IMG_5349.JPG

Partager cet article
Repost0
17 avril 2011 7 17 /04 /avril /2011 11:15

 

1288.png

Comme elle se définit, Entraide et Fraternité est une ONG catholique de solidarité internationale créée en 1961 qui défend une société plus juste et plus égalitaire en travaillant en partenariat avec plus de 110 associations dans le sud, en informant, sensibilisant et mobilisant des milliers de citoyens-nes pour plus de solidarité nord/sud. Entraide et Fraternité est composée d’une équipe motivée et d’un vaste réseau de bénévoles très actifs.

 

Lors de la journée du 2 avril à la Chèvrerie, nous avions rencontré Xavier Jadoul qui est responsable du bureau 174735 185086088198675 7265223 nrégional du Tournaisis pour Entraide. Il nous avait alors parlé de son article "Agriculteurs: exploitants ou exploités?" (qui est disponible dans le dossier Dropbox) et de l'engagement de son ONG pour la paysannerie. Je vous invite vraiment à (re)lire cet article ainsi qu'à consulter le site web d'Entraide et Fraternité. La défense des paysans passe par quatre campagnes: une première sur le problème foncier "Sans terre, pas d'avenir", une deuxième sur les impacts des changements climatiques sur la petite paysannerie "Créons un climat favorable à l’agriculture paysanne", la troisième campagne défend la Souveraineté alimentaire et la dernière se penche sur les conditions des femmes paysannes dans le Sud "Elles cultivent. Qui récolte?"

 

IMG_5420.JPG

Partager cet article
Repost0